Depuis la création en 2001 du Collectif des centres de documentation en histoire ouvrière et sociale (CODHOS), les sources de l’histoire sociale se sont extraordinairement élargies en changeant de nature et de support.

Parallèlement à la production de nouvelles archives, notamment numériques, de nouvelles formes de mobilisations viennent bousculer les organisations ouvrières, syndicales et politiques au sein desquelles persistent néanmoins les modes traditionnels d’expression et d’intervention publique.

Ces évolutions importantes, dont les prodromes se situent dans l'après-68, se sont manifestées à l'orée des années 1980 en s’accélérant dans la période 1995-2001. Elles ont complètement bouleversé la manière d'interroger et d'analyser le champ de l'histoire ouvrière et sociale par les chercheur·e·s (historien·ne·s, sociologues, politistes, économistes, etc.) et obligé les archivistes à de nouvelles politiques et techniques de collecte, de conservation et de valorisation des fonds. L'incidence première s'est traduite dans le champ sémantique par l’évolution, voire la substitution, des terminologies : « histoire du mouvement ouvrier » vers « histoire sociale », « histoire des mouvements sociaux » vers « histoire populaire ». Dans le domaine de l’archivistique et de la conservation documentaire, le changement principal concerne ces documents nativement numériques, désormais incontournables. Les données du web et les réseaux sociaux sont devenus des sources primaires au même titre que les « archives traditionnelles » (archives papier, orales, audiovisuelles). Les campagnes de numérisation de fonds d’archives se sont également multipliées, souvent dans le cadre de projets collectifs, nationaux ou internationaux qui produisent des données de la recherche rendues accessibles au grand public.

Le développement et la progressive professionnalisation des centres d’archives et de documentation « militants » (liés par exemple à des partis ou à des syndicats) est aussi à souligner. Aux archives de la répression (archives de police en particulier) largement mobilisées autrefois par les historien·ne·s du social et aux « archives pour la recherche » collectées et mises à disposition par les établissements universitaires, s’ajoutent désormais celles traitées et valorisées par les services d'archives des producteurs eux-mêmes.

À l'occasion de son vingtième anniversaire, le CODHOS, dont les membres vivent et accompagnent au quotidien ces bouleversements, organise deux journées d’études pluridisciplinaires autour des sources de l’histoire sociale. Elles seront l’occasion de poursuivre les missions qu'il s'est fixées lors de sa création : organiser et favoriser les rencontres et les échanges entre chercheur·e·s en sciences sociales et archivistes, bibliothécaires, documentalistes et autres professionnel·le·s de la conservation, sur cette relation entre l’événement social et historique, l’archive produite et l’utilisation qui en est faite.

Il sera demandé aux intervenant·e·s d’entreprendre une démarche réflexive sur leur « pratique des archives » afin de répondre à un certain nombre de questions. Quelles opportunités de recherches le foisonnement de nouvelles sources a-t-il permis et favorisé ? Dans quelle mesure ces archives mises à disposition, ainsi que les outils innovants développés pour les signaler et les mobiliser, ont-ils contribué au renouvellement des questionnements et objets de recherche ? Ces mutations ont-elles participé, et de quelle manière, au décloisonnement des disciplines ? L’accès à des «  archives inédites » (notamment nées numériques) a-t-il modifié le regard porté sur les mouvements sociaux qui les produisent et plus largement sur le monde militant ? La difficulté d’accès à certaines sources, voire leur absence, seront également interrogées, de même que la surabondance de données disponibles sur Internet qui, non traitées ou mal référencées, ont pu impacter travaux des chercher.e.s.

Comment les professionnel·le·s qui travaillent dans des institutions publiques et privées ont-il·elle·s pris en compte ces évolutions ? Comment relèvent-t-il·elle·s les défis qu’elles impliquent ? Comment établissent-il·elle·s leurs priorités ? Quels dialogues ont-il·elle·s noué avec les producteur·rice·s de ces archives (militant·e·s politiques, syndicaux et associatifs, entre autres), les chercheur·e·s et les autres publics (journalistes, écrivain·ne·s, documentaristes, particuliers passionnés d’histoire) autour de ces problématiques ? Ils ou elles pourront étayer leurs réflexions sur la collecte, le traitement et la mise à disposition des sources d’histoire sociale en présentant des travaux et projets à partir de fonds concernés par les thématiques choisies et au-delà.

Sous forme de tables rondes, professionnel·le·s et usager·ère·s des archives seront invité·e·s à échanger sur ces questions à partir de sources relevant de quatre thématiques « emblématiques » pour l’histoire ouvrière et sociale qui ont suscité ces dernières années des travaux novateurs :

1- le travail (conditions de travail et santé, désindustrialisation, environnement, genre, précarisation, etc.)
2- le cadre de vie (logement, éducation, temps libre, protection sociale, etc.)
3- les mobilisations (luttes syndicales, le rapport au politique, nouvelles formes de mobilisation notamment les ZAD, Nuits debout, les Gilets jaunes, #metoo, etc.)
4- l’international (circulation des personnes et des idées, migrations, solidarités, globalisation, etc.).

Modalités de proposition
Les propositions de communication, rédigées en français ou en anglais, devront comporter un titre et un bref résumé de la communication (5 000 caractères espaces compris). Elles seront envoyées au plus tard 1er décembre 2020 à l’adresse suivante : a.mazet@ihs.cgt.fr

Comité scientifique :
Barbara Bonazzi (Centre d’histoire sociale des mondes contemporains, CNRS), Virginie Hébrard (Bibliothèque d’histoire sociale La Souvarine, AD 92), Ioanna Kasapi (Cité des Mémoires étudiantes), Eric Lafon (Musée de l’histoire vivante), Jean-Philippe Legois (Cité des Mémoires étudiantes), Stéphanie Legrand (Autour du 1er mai), Aurélie Mazet (Institut CGT d’histoire sociale), Thierry Mérel (Fondation Jean-Jaurès), Anne-Marie Pavillard (Archives du féminisme), Tatiana Sagatni (Institut CGT d’histoire sociale Mines-Énergie), Hèlene Saudrais (Archives CFDT), Rossana Vaccaro (GED-Campus Condorcet), Franck Veyron (La Contemporaine).

Partenariats (liste non définitive): 

  • Archives CFDT
  • Centre d’histoire sociale des mondes contemporains (Université Paris 1/CNRS)
  • Fondations Jean-Jaurès
  • Grand équipement documentaire (GED) - Campus Condorcet

Lieu 

  • Auditorium du Centre des Colloques du Campus Condorcet, Place du Front Populaire 93322 Aubervilliers

Dates :

  • 10-11 juin 2021

Contacts :

  • Rossana VACCARO, coordinatrice des référents, Service Soutien à la recherche et à l'innovation, GED-Campus Condorcet/CHS - rossana.vaccaro@campus-condorcet.fr
  • Aurélie MAZET, responsable des archives confédérales à l’IHS CGT - a.mazet@ihs.cgt.fr